Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/34

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que le titre du poème : « La fiancée de Corinthe » ne laisse aucun doute quant à la direction suivie par le jeune homme. La reproduction de la première strophe s’effectua assez bien ou, du moins, sans déformation choquante. Après le premier vers de la deuxième strophe, mon collègue sembla chercher un moment ; mais il se reprit aussitôt et récita ainsi :

Aber wird er auch willkommen scheinen,
Jetzt, wo jeder Tag was Neues bringt ?
Denn er ist noch Heide mit den Seinen
Und sic sind Christen und — getauft.

(Mais sera-t-il le bienvenu — Maintenant que chaque jour apporte quelque chose de nouveau ? — Car lui et les siens sont encore païens, — tandis qu’eux sont chrétiens et baptisés.)

Depuis quelque temps déjà, je l’écoutais un peu étonné mais après qu’il eut prononcé le dernier vers, nous reconnûmes tous deux qu’une déformation s’était glissée dans cette strophe. N’ayant pas réussi à la corriger, nous allâmes chercher dans la bibliothèque le volume des poésies de Goethe, et grand fut notre étonnement de constater que le deuxième vers de cette strophe avait été remplacé par une phrase qui était, d’un bout à l’autre, de l’invention du collègue. Voici le texte correct de ce vers :

Aber wird er auch willkommen scheinen,
Wenn er teuer nicht die Gunst erkauft ?

(Mais sera-t-il le bienvenu – s’il n’achète pas cher cette faveur ?)

D’ailleurs, le mot erkauft (du deuxième vers authentique) rime avec getauft (du quatrième vers), et il m’a paru singulier que la constellation de ces mots : païen, chrétien et baptisés ne lui ait pas facilité la reproduction du texte.

— Pourriez-vous m’expliquer, demandai-je à mon collègue, comment vous en êtes venu à oublier si