Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/286

From Wikisource
Jump to navigation Jump to search
This page has not been proofread.

déjà causé pas mal d’ennuis et coûté beaucoup d’argent, venait d’engager sa montre et demandait l’argent nécessaire pour la dégager et la rapporter à la maison. Cette manière malhonnête de se faire prêter de l’argent avait péniblement impressionné notre homme et lui avait rappelé tous les méfaits antérieurs du même parent, méfaits dont il eut tant à souffrir depuis des années. Son acte symptomatique apparaît dès lors comme ayant été déterminé par plusieurs motifs : d’un côté, il exprime à peu près son intention de ne pas se laisser extorquer de l’argent de cette manière et semble vouloir dire : « puisqu’on a besoin d’une montre à la maison, je laisse la mienne»; seulement, comme il a lui-même besoin de sa montre pour le rendez-vous du soir, son intention ne peut se réaliser que par la voie inconsciente, sous la forme d’un acte symptomatique. D’autre part, son oubli signifie encore ceci : les éternels sacrifices d’argent que je fais pour ce vaurien finiront par me ruiner et je serai obligé de me dépouiller de tout ce que je possède. Bien que l’impression produite par le récit de sa mère n’ait été, d’après lui, que momentanée, la répétition du même acte symptomatique montre que son inconscient continuait à subir l’influence de ce récit, qu’il en subissait l’obsession, tout comme on subit l’obsession d’idées conscientes 88. Étant donné cette manière de se comporter qui caractérise l’inconscient, nous ne trouvons pas étonnant que la montre empruntée ait une fois subi le même sort que celui qui a frappé la montre de notre sujet. Mais il y a peut-être des raisons spéciales qui ont favorisé ce transfert de l’oubli à l’ « innocente » montre de dame. Il se peut que notre homme ait eu la velléité inconsciente de garder cette montre pour remplacer la sienne, qu’il considérait comme