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Page:Reboux-Müller - À la manière de, sér1-2, 1921.djvu/195

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maurice barrès

les projeter sur mon univers, ou bien je me reposais en considérant le sol lorrain.

Devant les topinambours, ces déracinés de la terre des ancêtres, se ranimait mon activité cérébrale. Leurs tubercules troués de cavités poudreuses semblaient des crânes. Par une bizarrerie d’imagination, je m’appliquais, disciple d’Hamlet, à me croire dans un cimetière, et comme la subconscience m’avertissait de l’erreur, j’éprouvais une fastueuse délectation à méditer sur la mort au sujet d’une matière propre à l’entretien de la vie. Cette pensée m’enivrait d’une tristesse ardente, et d’innombrables idées secondaires se cristallisaient autour d’elle. Nature ! Tu es belle et glorieuse ! Depuis tes avalanches torrentielles jusqu’à tes sécheresses qui rendent la terre pareille à ma sensibilité contractée, depuis tes collines qui forment des croupes nues au ras de l’horizon jusqu’à tes taupinières qui pointent comme un sein discret de vierge !