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Page:Labi 2009.djvu/139

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des audiences de la judicature des traites et gabelles conservent quant à eux, à travers les seules sentences, la trace de nombreuses autres affaires.[14] Enfin et surtout, les employés des fermes sont trop peu nombreux pour assurer en permanence une présence dissuasive sur les points les plus exposés à la fraude. Actifs sur le terrain sous la forme de brigades, rattachées à des postes disposés aux principaux points de passage, ces gardes patrouillent en permanence, le plus souvent à pied si l’on se fie aux temps de parcours mentionnés.[15] Mais la faiblesse de leurs effectifs conduit l’intendant Fontanieu à constater, au début des années 1730, qu’«il n’y a pas assez de brigades dans les Montagnes pour veiller avec succez le grand nombre de gorges par ou l’on peut passer»: six hommes seulement à Villevieille «pour empecher les versemens du sel de la vallée de Barcelonnette», neuf à La Vachette, «au pied du Montgenevre» qui marque la frontière avec le Piémont, six à La Madeleine, «au pied du Lautaret», qui «s’occupe[nt] principalement a empecher l’introduction du sel de Briançon dans l’Oysans», quatre enfin pour la brigade de Guillestre, qui «s’oppose au versement du sel de Barcelonnette dans l’Embrunois» (comme les six hommes de la brigade de Savines) et «a l’introduction du sel de Queyras par la grande Combe de Guillestre».[16] Ajoutons, à cette géographie de la surveillance et de la fraude, un dernier point de passage stratégique: le verrou de L’Argentière, dont la communauté regroupe, à deux lieues au sud de Briançon, 21 villages ou hameaux parmi lesquels deux - La Bessée Haute et La Bessée du Milieu - sont dans le territoire du Briançonnais et bénéficient par conséquent du privilège.

Les interventions des brigades résultent le plus souvent de dénonciations anonymes («sur l’avis à nous donné que plusieurs habitans de la Grave se servoit du sel privilégié accordé au Briançonois par Sa Majesté»)[17] ou d’informations transmises par le receveur des gabelles («sur les avis a nous donnés par Mr Dumont receveur des gabelles a Embrun, contenant que plusieurs particuliers de l’Embrunois transportaient du sel du Briançonnois païs privilégié dans ledit Embrunois non privilégié»).[18] Elles peuvent prendre différentes formes. La surveillance s’exerce parfois dans les rues mêmes de Briançon, les jours de foire ou de marché: les gardes repèrent alors les personnes suspectes («nous aurions pris garde a quelques personnes de la Grave qui etoit au marché de Briançon pour voir s’il achetoit du sel qui leur ait defendu»)[19] avant d’aller les attendre sur le grand chemin qui les ramène chez elles. Plus courantes sont les perquisitions: qualifiées de «visittes ordinaires et domicilliaires», elles voient fondre en même temps une quinzaine de gardes sur un hameau,[20] ou ciblent au contraire des domiciles précis.[21] Mais les embuscades aux points de passage