Page:Labi 1998.djvu/260

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est confirmé par d’autres archives. Ainsi des correspondances attestent du rendement de ce commerce,[29] mais aussi de la mise en place de véritables organisations pour l’assurer vers des destinations encore plus lointaines comme l’Algérie.

Classiquement attendus dès que l’on parle de colportage, tissus, produits de mercerie ou même petits objets fabriqués et sculptés sur place[30] font partie des ballots. La mémoire aime à retenir l’exemple des «Américains» ayant eu l’idée d’aller écouler les rebuts des Grands Magasins parisiens comme Le Bon Marché ou la Belle Jardinière. En réalité les correspondances et autres cahiers de compte renseignent sur la nature des cargaisons comme sur le système des participations dans les affaires menées. Il y a bien duplication du système des grands magasins, mais l’évocation des avances demandées aux Grands Magasins parisiens renvoie davantage au système des commissionnaires et autres fournisseurs intermédiaires, essentiels dans l’organisation du commerce international comme, d’ailleurs au niveau de boutiques plus modestes en France.

Les activités commerciales trouvent parfois un prolongement dans le secteur industriel, mais celui-ci reste largement minoritaire. L’exemple le plus fameux est celui d’une famille aiguillonne qui, fortune faite au Brésil, s’est lancée dans l’exploitation de mines de nickel en Nouvelle-Calédonie, sans le succès escompté. Ce passage au secteur secondaire est souvent une activité dérivée du commerce et aussi celle des générations suivantes. Ainsi, la famille Toy-Riont, après la phase commerciale classique des produits laitiers, a étendu son affaire en créant une entreprise d’huileries et savonneries à Marseille. Pendant quelques années également, certaines familles américaines ont ajouté à leurs magasins des usines de fabrication, leur permettant de produire sur place et à moindre coût les objets de leur négoce.[31]

Quel qu’il soit, le commerce explique les directions suivies par les migrants. Selon les circonstances, elles éloignent parfois très durablement les membres d’une même famille. Il y aurait beaucoup à dire sur ces directions tout à la fois préférentielles mais aussi très complexes, qui ne conduisent pas les migrants uniquement vers la Provence ou le Dauphiné.[32] Il reste qu’une tendance générale s’esquisse au cours du 19e siècle, celle d’une relative spécialisation et d’un resserrement du nombre des destinations face à l’extrême diversité du siècle précédent. C’est encore plus vrai dans la première moitié du 20e siècle, expliquant la focalisation de la mémoire sur Marseille, Toulon, Lyon et l’Amérique.

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HISTOIRE DES ALPES - STORIA DELLE ALPI - GESCHICHTE DER ALPEN 1998/3