Page:Labi 1998.djvu/153

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fin du 14e siècle, cette communauté répondant à 105 patronymes différents pouvait représenter un minimum de la moitié des foyers de la vallée, elle est réduite, au moment de la révision de feux de 1474, à un pourcentage compris entre 10 et 15% de ceux-ci. Des 105 patronymes vaudois attestés en 1380, il n’en susbsite qu’une cinquantaine dont 12 seulement sont portés par des Vaudois: il y a donc eu une double érosion, par conversion, sans déplacement, et plus importante, par les départs.[12] À L’Argentière de même, la communauté a connu un affaiblissement considérable: une liste précise de bannis pour Valdéisme dressée en 1492[13] cite 23 familles dans une communauté évaluée à 132 feux en 1475: elle ne dépasse donc pas 18% du total. Dans les deux cas, l’enquête conduite sur la position sociale des Vaudois restés présents montre qu’il s’agit de familles bien enracinées que leurs biens situent à un niveau notable dans la liste des contribuables et parmi lesquels se détachent quelques lignages dominants aptes à accepter les périls et les responsabilités qu’implique le choix de «vivre en minorité». Ceux d’entre eux qui échappèrent à la croisade trouvèrent un refuge en Val Luserne où on les retrouve en 1490.

La situation de Freissinières montre un résultat différent. L’érosion qu’on peut suivre et dater n’a pas altéré la physionomie de la vallée du point de vue du critère de l’appartenance religieuse puisqu’à la veille de la croisade, les 108 feux établis sont tous vaudois; les effets de la répression et des bannissements n’en sont que plus spectaculaires: on s’explique que, sentences de bannissements collectifs prononcées, une forte implantation vaudoise se soit effectuée à Gap[14] - un prêtre évoque sa connaissance de 400 membres de ces familles, au cours de la quinzaine d’années qui sépare leur installation de son témoignage de 1507 - et en Lubéron.[15] Ainsi perçoit-on dans le mouvement d’hémorragie qui fonde les implantations nouvelles au cours du 15e siècle, un temps fort de l’exode lié à un paroxysme de la crise religieuse.

En Valcluson, communauté la plus nombreuse, l’extrême mobilité perceptible à partir de la fin du 14e siècle contraste avec la stabilité du temps de la croissance interne du siècle précédent. En témoignent la réduction spectaculaire du nombre des feux - 674 en 1339,380 en 1475 (récupération à 56%), mais avec un étiage à 112 en 1434, année où 129 feux sont vacants -, la disparition des patronymes d’une révision à l’autre et leur instabilité. Aux dires répétés des témoins, les poursuites contre les Vaudois sont la cause majeure de la dépopulation et des vacances. D’autres éléments doivent bien

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PARAVY: MIGRATIONS ET RELIGION