Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/221

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g) Les effets consécutifs aux actes manqués des individus normaux sont généralement anodins. D’autant plus intéressante est la question de savoir si des actes manqués d’une importance plus ou moins grande et pouvant avoir des effets graves, comme par exemple ceux commis par des médecins ou des pharmaciens, peuvent, sous un rapport quelconque, être envisagés à notre point de vue.

N’ayant que très rarement l’occasion de faire des interventions médicales, je ne puis citer qu’un seul exemple de méprise médicale tiré de mon expérience personnelle. Je vois depuis des années deux fois par jour une vieille dame et, au cours de ma visite du matin, mon intervention se borne à deux actes : je lui instille dans les yeux quelques gouttes d’un collyre et je lui fais une injection de morphine. Les deux flacons, un bleu contenant le collyre et un blanc contenant la solution de morphine, sont régulièrement préparés en vue de ma visite. Pendant que j’accomplis ces deux actes, je pense presque toujours à autre chose; j’ai en effet accompli ces actes tant de fois que je crois pouvoir donner momentanément congé à mon attention. Mais un matin je m’aperçois que mon automate a mal travaillé : j’ai en effet plongé le compte-gouttes dans le flacon blanc et instillé dans les yeux de la morphine. Après un moment de peur, je me calme en me disant qu’après tout quelques gouttes d’une solution de morphine à 2 pour cent instillées dans le sac conjonctival ne peuvent pas faire grand mal. Mon sentiment de peur devait certainement provenir d’une autre source.

En essayant d’analyser ce petit acte manqué, je retrouve tout de suite la phrase : « profaner la vieille 75 », qui était de nature à m’indiquer le chemin le plus court pour arriver à la solution. J’étais encore sous