Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/115

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véritable et que le lapsus met à nu l’insincérité internet[1]. Le lapsus devient ici un moyen d’expression mimique ; il sert d’ailleurs souvent à exprimer ce qu’on ne voulait pas dire, à se trahir soi-même. Tel est, par exemple, le cas de cet homme qui dédaigne les rapports sexuels dits « normaux » et qui dit, au cours d’une conversation où il est question d’une jeune fille connue pour sa coquetterie : « si elle était avec moi, elle désapprendrait vite à koëttieren ». Il n’est pas difficile de voir que le mot koëttieren (mot inexistant), employé à la place du mot kokettieren (coquetter), n’est que le reflet déformé du mot koitieren (coïter) qui, du fond de l’inconscient, a déterminé ce lapsus. Et voilà un autre cas : « Nous avons un oncle qui nous en veut de ne pas être venus le voir depuis des mois. Nous apprenons qu’il a changé d’appartement et nous saisissons cette occasion pour lui faire enfin une visite. Il parait content de nous voir, et lorsque nous prenons congé de lui, il nous dit très affectueusement : « J’espère désormais vous voir plus rarement qu’auparavant. »

Par une coïncidence favorable, les mots du langage peuvent occasionnellement déterminer des lapsus qui vous bouleversent comme des révélations inattendues ou produisent l’effet comique d’un mot d’esprit achevé.

Tel est, par exemple, le cas observé et communiqué par le Drͤ Reitler :

« Votre chapeau neuf est ravissant, dit une dame à une autre, sur un ton admiratif ; c’est vous-même qui l’avez si prétentieusement orné ? » (aufgepatzt, au lieu de aufgeputzt, garni).

« Les éloges que la dame voulait adresser à son amie durent en rester là ; car la critique qu’elle avait formulée dans son for intérieur, en trouvant la garniture du chapeau (Hutaufputz) prétentieuse (eine

  1. C’est en mettant dans sa bouche un lapsus de ce genre que B. Anzengruber flétrit dans « G’wissenswurm » l’héritier hypocrite qui n’attend que la mort de celui dont il doit hériter.