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pierre loti

VI

 

Nous sommes au mois d’août. C’est l’hiver. Il est onze heures du matin, et il fait nuit noire, car sous ces lointaines latitudes l’ordre des saisons et des heures se trouve renversé, et ce n’est pas la moindre cause de ma perpétuelle angoisse que ce retournement des choses naturelles.

Vers midi, l’aube est venue, l’aube de mon dernier jour.

Oui, c’est mon dernier jour à Toutouasamémé. Depuis deux mois que je vis ici, séparé des miens par l’épaisseur effroyable de la terre, je me suis endormi dans une existence de rêve et d’oubli. Mais il faut partir. L’ordre est arrivé hier, comme un coup de foudre. L’Amiral-Picard met à la voile dans une heure. Il faut partir.

Quel temps ! il fait sombre et froid. Les