ressort, leur imputer la conservation d’une culture et d’une organisation sociale et économique, sans aller jusqu’ à évoquer un immobilisme apparent? La question n’est certainement pas sans fondements mais elle ne doit pas cacher le rôle que les retours ont eu sur les mutations des mentalités et des modes de vie de nombreuses communautés alpines.
Or, les contributions du séminaire et donc du dossier ont porté essentiellement, nous l’avons dit, sur les migrations des périodes modernes et contemporaines jusqu’aux années 1950. À partir de cette période, les hautes vallées entrent dans une autre configuration économique, sociale et culturelle, à l’instar de ce qui se passe plus généralement et, après avoir connu un étiage démographique, voit leurs populations s’accroitre à nouveau. Un certain nombre de localités connaissent des phénomènes migratoires tout aussi intéressants à analyser, qui se déclinent en termes de migrations saisonnières, temporaires, et même définitives. Il n’est que de penser à l’arrivée et à l’installation de populations venues de l’extérieur pour bénéficier d’un cadre de vie, de possibilités d’emplois et d’activités ou plus simplement pour passer un séjour plus ou moins long et régulier de vacances ou de retraite. De la même manière, la pluriactivité et les emplois temporaires saisonniers sont à la base d’une partie de ces mouvements de plus en plus complexes et divers quant au nombre et aux catégories de personnes concernées. Une des différences majeures avec les migrations des siècles précédents ne tient pas seulement au sens ou à la provenance initiale des migrants. Elle procède essentiellement du nombre des migrants. Les migrations de tourisme génèrent en effet des quantités numériques souvent très fortes de
migrants, mais aussi présentent une concentration et un renouvellement rapide de ces derniers dans un laps de temps court. On est là bien entendu dans des phénomènes de retour qui sont d’une autre facture comme le montre le texte de A. Zurfluh, des «retours» sans qu’il n’y ait forcément migration initiale. Ils posent cependant des questions d’ordre méthodologique et conceptuel qui ne peuvent que compléter celles évoquées pour les périodes précédentes. On a là un autre chantier dont les historiens doivent à leur tour s’emparer.[32] On le comprend, la thématique du ou des retours est un bon prisme pour relire les migrations alpines et les mécanismes qui les organisent. Plus encore, c’est une entrée intéressante et stimulante pour appréhender l’histoire des sociétés alpines jusque dans les périodes les plus contemporaines.