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Delle. Il est frappant de constater qu’il n’existe pas de mention de retours en Italie. La communauté trentine à Delle semble s’être complètement stabilisée. Après 1958, il y a encore quelques arrivées et, peu à peu, la vague migratoire trentine se tarit, comme l’ensemble de l’immigration italienne en France.

Beaucoup de ces migrants sont encore en vie, ce qui m’a permis d’effectuer de nombreux entretiens. Ainsi, Giuseppina M., arrivée à Delle le 17 février 1950 à l’âge de 17 ans. Son cas est particulièrement représentatif de l’ensemble des personnes interrogées. Certains membres de sa famille étaient déjà in- stallés en France, et partir en France était alors considéré comme normal. Elle se souvient aussi qu’à l’école elle entendait dire du bien de la France et qu’elle avait même appris à chanter la Marseillaise en italien. Elle est venue à Delle pour aider ses cousins et ses oncles émigrés avant la guerre. Après quelques semaines seulement, elle décida de s’installer à Delle et de ne plus revenir au Trentin et dans les années qui suivent elle épouse un homme de son village qu’elle avait déjà connu avant la guerre avant que lui aussi n’émigre en France. Une fois établi à Delle, son mari se mit à son compte comme maçon. Quelques problèmes rencontrés au début les firent hésiter. Fallait-il rester à Delle ou tenter l’aventure aux Etats-Unis pour y rejoindre d’autres cousins? Mais peu à peu, avec le temps, ils décidèrent de rester en Franche-Comté. Giuseppina M. s’est très rapidement adaptée à la vie à Delle qui lui est vite apparue comme celle d’une grande famille. Pour elle, il s’agissait du meilleur endroit de la France. Elle m’a confié avoir élevé ses enfants comme des «petits Français» en faisant tout pour les intégrer le plus rapidement possible à la communauté autochtone tout en leur transmettant certains aspects de la culture trentine, ainsi quelques notions de dialecte et des chansons traditionnelles, surtout lors des retours dans le Trentin pour les vacances. Aujourd’hui, son mari est décédé depuis plus de 22 ans. Elle a gardé une profonde nostalgie pour le Trentin, y faisant de nombreux vo- yages. Elle reçoit toujours le magazine de l’association Trentini nel Mondo (auquel elle est abonnée et auquel elle a déjà envoyé des articles) et le journal d’informations de sa commune d’origine, Trambileno, de même que d’autres publications de l’administration provinciale.

J’ai également réalisé des interviews de migrants originaires des vallées du Leno qui se sont établis dans d’autres régions de France, notamment aux environs de Cluses en Haute-Savoie. Leur situation présente des similitudes avec celle des Trentins de Delle. Les métiers exercés étaient, dans la plupart des cas, maçons ou bûcherons pour les hommes, et des métiers très variés

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Histoire des Alpes - Storia delle Alpi - Geschichte der Alpen 2009/14