Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/312

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le paranoïaque a donc, dans une certaine mesure, raison : il voit quelque chose qui échappe à l’homme normal, sa vision est plus pénétrante que celle de la pensée normale; niais ce qui enlève à sa connaissance toute valeur, c’est l’extension à d’autres de l’état de choses qui n’est réel qu’en ce qui le concerne lui-même. J’espère qu’on n’attend pas de moi une justification de telle ou telle interprétation paranoïaque. Mais en admettant, dans certaines limites, la légitimité d’une telle conception des actes manqués, nous rendons plus facilement compréhensible la conviction qui, chez le paranoïaque, se rattache à toutes ces interprétations. Il y a du vrai dans tout cela, et ce n’est pas autrement que nos erreurs de jugement, même lorsqu’elles ne sont pas morbides, acquièrent à nos yeux une certitude qui entraîne notre conviction. Cette conviction, justifiée en ce qui concerne une certaine partie de notre raisonnement erroné, ou la source d’où il provient, est étendue par nous à l’ensemble dont ce raisonnement fait partie.

b) Nous voyons une autre preuve de l’existence d’une connaissance inconsciente et refoulée de la motivation des actes manqués et accidentels dans cet ensemble de phénomènes que forment les superstitions. Je vais illustrer mon opinion par la discussion d’un petit événement qui servira de point de départ à nos déductions.

Rentré de vacances, je commence à penser aux malades dont j’aurai à m’occuper au cours de l’année qui commence. Je pense en premier lieu à une très vieille dame que je vois depuis des années (voir plus haut) deux fois par jour, pour lui faire subir les mêmes interventions médicales. Cette uniformité m’a souvent fourni une condition favorable à l’expression de