Page:Freud - La Psychopathologie de la vie quotidienne, 1922, trad. Jankélévitch.djvu/299

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cœur beaucoup de numéros de cette collection) correspond à la Faute de Müllner. Je suis constamment tourmenté par l’idée que c’est par ma faute que je ne suis pas devenu ce que mes aptitudes pouvaient me faire espérer. Je me souviens ensuite que le No 34 de la Bibliothèque Reclam correspond à une nouvelle du même Müllner, intitulée Kaliber (Le calibre). Je coupe en deux parties ce titre et j’obtiens « Kaliber »; je constate que ce mot contient les mots « Ali » et « Kali » (potasse). Ceci me rappelle que je faisais un jour des bouts rimés avec mon fils Ali (âgé de 6 ans). Je le priai de trouver une rime à Ali. Il n’en trouva aucune et me demanda de la faire à sa place. Je dis : «ALI reinigt sich den Mund mit hypermangansaurem KALI » «( Ali se rince la bouche avec du permanganate de potasse»). Nous avons beaucoup ri et Ali fut très gentil. Ces jours derniers, je fus contrarié de trouver que Ali « KA (Kein) LIeber ALi sei » (« qu’Ali n’était pas gentil »; Ka -abréviation de Kein).

« Je me demande ensuite : « Quel ouvrage de la Bibliothèque Reclam porte le Nº 17 ? » Je suis certain de l’avoir su; je suppose donc que j’ai voulu l’oublier. Toutes les recherches que je fais pour retrouver ce souvenir restent sans résultat. Je veux me remettre à la lecture, mais ne réussis qu’à lire machinalement, sans comprendre un seul mot, sans cesse tourmenté par ce numéro 17. J’éteins la lumière et continue de chercher. Je me rappelle finalement que le Nº 17 doit correspondre à une pièce de Shakespeare. Mais laquelle? Je trouve : Héro et Léandre. C’est là évidemment une absurde tentative de ma volonté de détourner mon attention. Je me lève et consulte le catalogue de la Bibliothèque Reclam : le No 17 correspond à Macbeth, de Shakespeare. A ma grande stupéfaction, je suis obligé de reconnaître que je ne sais à peu près rien de cette pièce, bien qu’elle ne m’intéresse pas moins que les autres drames de Shakespeare.